Témoignages

Année #1, La Maison populaire

La Maison du parc du 02/10/2021 au 02/10/2022

Lucie

samedi 14 mai 2022 à 20 h 23

« Dans mon four solaire, je vis pai­si­ble­ment. J’ima­gine déjà tendre un cable de la cabane de verre jusqu’au soleil, en une longue tyro­lienne enchan­tée. Ailleurs, la vie d’une proche s’échappe mais ici la vue exulte. Et c’est sur la grande langue de pelous qu’elle est la plus forte. Samedi soir de ten­dresse, les enfants rou­lent dans l’herbe, se cour­sent et crient. Ils sont les seuls à me voir. Je veille sur eux ; et je des­cends mon regard, c’est plus fort que moi. La musi­que est trop forte et la pelouse est si verte. Le soleil va finir sa course der­rière les immeu­bles, c’est sûr. Mais en bas, ils ne le savent pas. Lui non plus semble ne pas vou­loir renon­cer. Il envoie sur tous les bâti­ments un rai blanc puis­sant, qui les vitres ren­voient en miroir.

Dans mon four solaire, je suis pai­si­ble­ment. Je recule, je tourne en rond et je vise des endroits précis. Je suis à hau­teur d’oiseau, à hau­teur de cime d’arbre. Je suis une feuille, légère, qui va planer et vire­vol­ter, avant de tomber sur cette pelouse si verte. Un enfant me trou­vera-t-il ? Barbe-à-papa, vélos, voiles, bal­lons et même un dragon de papier à six jambes. Le spec­ta­cle est sai­sis­sant, le bruit assour­dis­sant. Regarder le ciel pour s’échapper, recu­ler dans la cabane pour mieux pro­fi­ter de l’ins­tant.

Dans mon four solaire, je vois pai­si­ble­ment. Les lignes blan­ches lais­sées par les avions et for­ment des let­tres en se croi­sant et le soleil et a décidé de ne pas faire ce que je lui avais com­mandé. Il ne ter­mi­nera pas sa course der­rière les immeu­bles. Il s’écrasera contre des nuages tout dou­ce­ment et finira par se confon­dre avec eux. Une heure a dû passer, c’est sûr, et pour­tant la porte de la cabane ne s’ouvre pas.

Dans mon four solaire, ça y est, je n’y suis plus. »

Lucie

Partager sur :