Guy
« Merci à mon amie qui m’a parlé des Veilleurs au cours d’un dîner. Je l’écoutais attentivement et j’essayais aussi de manifester un peu d’enthousiasme lorsqu’elle m’explique de quoi il s’agit. Et évidemment, spontanément, je lui ai déclaré que je voulais faire partie de cette sorte de chaîne de solidarité.
L’idée de veiller sur la ville m’a plu, me plaît, m’a plu. Je n’ai pas de porte-voix pour clamer « dormez braves gens, tout va bien ». Personne en bas ne m’a « calculé », comme on dit aujourd’hui. Mais je suis joyeux de participer à un projet à la fois individuel et collectif, je suis ragaillardi à l’idée que ce que je fais n’a pas de véritable impact sur la marche de la société. Je ne m’attendais pas à être touché par la grâce. Rien ne devait se passer et rien ne se passa, à part les chiens qui s’amusent tout en bas. La vue ? Le spectacle s’est assombri. Quelques lumières se sont allumées. L’ouïe ? Des voix entendues ici et là et le vague murmure du trafic. L’odorat ? Odeur du bois. Rien d’autre. Pas grande chose donc au niveau des sens. Et la pensée, alors ? Je ne voulais pas penser, à part peut-être rester un peu concentré sur ma tâche, veiller. J’ai essayé de ne pas penser à « Môa » et de ne pas penser aux humains. Juste laisser le temps s’écouler et le sentir passer. Oui, on le « sent passer », presque comme une sanction quand on a atteint un certain âge. J’aurais aimé sortir et dire tout de suite à Romain : « putain, qu’est-ce que je me suis fait « chier » ! » Mais non. Au fait, il est sympa, Romain. Cette veille, elle sert beaucoup à cela : à travers un projet basé sur la solitude, rencontrer des gens… Je m’arrête là. Il fait nuit maintenant. Je suis content, j’ai accompli ma mission, une mission humble, sans importance. C’est cool. Merci à tous. »
Guy