Eva
« À Dodo, Paris/Bagnolet le 27 août 2022.
Tu as vieillie Cité de la Noue.
Tu es décédée Cité de la Noue.
Ces dernières années tu étais seule et tu avais un peu peur.
Ton immeuble était toujours en travaux, l’ascenseur en panne. 6e étage. Je me souviens que la dernière fois que je suis venue te voir, ta fenêtre avait été remplacée par un bout de carton et que le mur de ta cuisine était à nu. On voyait presque les voisins. C’était la misère. Maman me disait, que ce n’était pas comme ça, quand vous aviez acheté il y a 20 ou 30 ans ; Que la Noue, c’était une promesse de petit havre de paix et puis…
Je n’ai jamais eu le courage de venir te voir seule ; j’avais l’impression que c’était le bout du monde. Jusqu’au jour où nous sommes venus vider ton appartement avec Damien. J’étais en retard. Comme à ton enterrement, comme aujourd’hui.
On avait traversé le parc et j’avais trouvé ça joli ; Je me souviens m’être dit que c’était dommage de ne pas être venue en métro, avant, pour te voir.
Je n’arrive pas à reconnaître d’ici quel était ton immeuble. J’ai cherché, mais je ne suis pas sûre de le reconnaître. Je vais aller voir.
J’ai passé quelques jours à contempler les couchers de soleil d’Islande et j’ai pensé à toi.
Je t’écrivais des mails et tu me disais que j’était une sacrée aventurière. Tu avais peu voyagé. Jamais sans ton mari ou presque. J’aurais aimé t’écrire. Aujourd’hui, je veille le soleil de Bagnolet mais aujourd’hui c’est toi que je veille, 1 an et demi après ta mort. Ça me touche. J’ai trouvé dans l’abri, une coccinelle morte. Je l’ai déposé dans un petit trou, en sécurité, cachée, avec tendresse. »
Eva